Pourquoi aimons-nous tant les contes - et bien longtemps après que soit passé le temps de l’enfance? Parce que ces récits simples et résistants, dont les images nous poursuivent, sont universels et divertissants, et continuent d’exercer un pouvoir sur l ‘imagination. Ce nouveau volume sur les contes et les légendes issues de la tradition orale laotienne comprend trois nouveaux contes spécifiquement écrits et adaptés pour la scène par Thiane Khamvongsa. Nous y trouverons les origines du riz (ou la légende du seigneur crapaud) sous la forme de théâtre d’objets. Ce mythe fondateur du monde, mêlant les destins de divinités et des héros, était la réponse de nos ancêtres à la création du monde, à une époque ou la science n’était pas assez avancée pour l’expliquer. Puis deux petits contes folkloriques, mettant en scène de simples villageois et des animaux, Le manguier et Le petit crocodile qui voulait manger un coeur de singe (sous la forme de théâtre d’ombres chinoises et de théâtre de marionnettes) nous donneront une petite leçon de sagesse. Car les enfants apprennent toujours des contes, parfois plus que d’un discours rationnel, pour la simple raison qu’ils s'adressent à eux sous une forme magique.Ils commencent par ces mots : il était une fois, dans un pays lointain... grâce auxquels l’enfant sait qu’il quitte le monde réel pour entrer dans l’imaginaire où tout est possible.
L’équipe
Texte, mise en scène et narration : Thiane Khamvongsa
Costumes et marionnettes : Thiane Khamvongsa, Ivana Lexa-French, la compagnie Khao Niew Marionnettistes : Thiane Khamvongsa, la compagnie des Bêtes sur la Lune et la compagnie Khao Niew
Où ?
L’institut Français du Laos, Avenue Lane Xang, Vientiane
Quand ?
- Lundi 20 mai à 13h30
- Mardi 21 mai à 9h
- Mardi 21 mai à 10h30
- Mardi 21 mai à 13h30
- Mercredi 22 mai à 9h
- Mercredi 22 mai à 10h30
- Jeudi 23 mai à 9h
- Jeudi 23 mai à 10h30
- Jeudi 23 mai à 13h30
- Vendredi 24 mai à 9h
- Vendredi 24 mai à 10h30
- Vendredi 24 mai à 13h30
L’ORIGINE DU RIZ (OU LA LÉGENDE DU SEIGNEUR CRAPAUD)
Au Laos, comme dans beaucoup de pays d’Asie du Sud-Est, le cycle de production du riz rythme la vie de la population depuis des siècles. Des cycles de la culture du riz provient l’organisation sociale des villages avec la gestion commune des système d’irrigation pour les rizières inondées, le semi-nomadisme des cultures sur brûlis du riz pluvial et un calendrier marqué par des fêtes et des cérémonies. Bang Fai, par exemple, connu aussi sous le nom de fête de la fusée, est célébré chaque année dans le nord-est de la Thaïlande et au Laos, en avril pour apporter de la pluie. Cette tradition vieille de plusieurs siècles aurait ses origines dans une histoire ancienne connue sous le nom de Mythe du roi crapaud. Bien plus qu’un simple aliment culinaire, le riz nourrit le corps mais aussi l’esprit, car il est un pivot, un symbole qui véhicule les mythes à l’origine de l’identité lao. Les laotiens le vénère car d’après une légende, ce ne serait pas un aliment ordinaire. Il viendrait du ciel et c’est le Phagna Thaen lui-même qui l’aurait offert aux hommes pour leur bien-être. Cette légende issue de la littérature orale laotienne commence ainsi.
Il était une fois, en des temps très lointains, quand la terre et le ciel se rejoignaient encore, les graines nourricières n’existaient pas. Mais la nature était généreuse, les espèces animales proliféraient et les hommes et les animaux vivaient en bon voisinage. Un jour, une longue sècheresse mit fin à cette douce vie. Cette sècheresse était telle qu’aucune plante qui nourrissait les hommes ne pouvait pousser. Les humains étaient donc condamnés à disparaître, mais tous les animaux, par solidarité, convoquèrent un conseil pour sauver tous les habitants de la terre. Tous participèrent du plus petit insecte, au plus grands primates, félins et même l’éléphant. C’est ainsi qu’ils décidèrent d’un expédition punitive au ciel, chez Phagna Thaen qui avait retenu les pluies. En effet, le Phagna Thaen était le roi du ciel et de tous les dieux. Il détenait le pouvoir suprême sur toutes formes de vie sur terre, et selon ses humeurs, il faisait et défaisait le bonheur et le malheur des êtres. Cette longue sécheresse ne pouvait donc qu’être les résultat de la mauvaise volonté du Phagna Thaen.
L’expédition fut préparé et quand tout fut prêt il ne resta plus qu’à décider du chef. Or tous les animaux voulaient être chef et ne parvenaient pas à se mettre d’accord. Le conseil des animaux édicta donc une nouvelle règle. Serait chef de l’expédition celui qui arrivera le premier sur l’autre rive de la rivière. Lorsque tous les animaux se précipitèrent au bord de la rivière pour être le plus proche possible, le crapaud lui, se plaça derrière le tigre. Dès que le signal fut donné, le crapaud sauta sur le tigre et lui mordit la queue. Le tigre secoua fortement sa queue vers l’avant et d’un seul mouvement, propulsa le crapaud sur l’autre rive. Quand tous les animaux arrivèrent, le crapaud les attendait tranquillement à l’arrivée.
- Hé ! Depuis quand es-tu arrivé ? demanda l’éléphant étonné.
Le crapaud répondit : Depuis longtemps, vous êtes tous très lents. J’ai même eu le temps de manger un tigre en vous attendant.
Et le crapaud ouvrit grand la gueule pour que tous puisse voir les poils de queue de tigre qui y étaient restés.
- Éléphant, approche-toi donc. J’ai encore faim, ajouta le crapaud.
- Seigneur Crapaud, tu seras notre chef ! s’écria la foule des animaux d’une vois unanime...
LE PETIT CROCODILE QUI VOULAIT MANGER UN COEUR DE SINGE
Il était une fois, un beau pays verdoyant qui s’appelait le Laos, Les animaux vivaient dans une bonne entente dans la forêt. Bien sûr certains animaux mangeaient des fruits et des plantes, et d’autres mangeaient... d’autres animaux. C’étaient des carnivores. Les crocodiles font partie de cette catégorie. Dans la rivière vivait une maman crocodile et son jeune fils. Les singes vivaient dans les arbres près de la rive du fleuve. Le jeune crocodile regardait rêveusement les singes. Un jour, la maman dit à son fils :
- Mon fils, qu'est-ce que tu veux manger pour le déjeuner aujourd’hui?
- Oh, maman, répondit l’enfant crocodile, regarde ces singes dans les arbres, leurs coeurs
doivent être si bon.
- Oui c’est vrai leur coeur est délicieux.
- Mais comment faisons-nous pour attraper un singe? Ils vivent dans les arbres, et nous ne
pouvons pas grimper aux arbres
- Tu penseras à quelque chose. Il est bien temps que tu apprennes à chasser. Maintenant, nage
et apporte-moi le cœur d'un singe
Le petit crocodile pensa et pensa. Il finit par avoir une idée. Il nagea près de la rive du fleuve. Lorsqu’il fut près des arbres, il leva les yeux et vit un jeune singe, mangeant des fruits mûrs.
- Bonjour le singe. Comment vas-tu ? demanda l’enfant crocodile.
- Bonjour crocodile. Je vais bien et toi ? répondit l’enfant singe.
- Je vais bien. Qu'est-ce que tu manges?
- Je mange des fruits mûrs. Tu en veux ?
- Non, merci, mais sais-tu que j'ai vu beaucoup de fruits mûrs de l'autre côté de la rive, ils
avaient l'air plus délicieux que ceux de ton arbre.
- Oh vraiment? dit l’enfant singe avait toujours adoré les fruits mûrs.
- Oui, en veux-tu? Ils avaient l'air vraiment délicieux.
- Oui, j'aimerais en avoir, mais comment puis-je aller de l'autre côté de la rivière? Je ne sais pas
nager.
- Oh, il n'y a pas de problème, je peux t’aider. Il te suffit de sauter sur mon dos et je vais
t’emmener là-bas.
LES BÊTES SUR LA LUNE
La compagnie des Bêtes sur la Lune a hérité son nom de la première pièce de théâtre contemporaine que Thiane Khamvongsa, fondatrice de la compagnie, a vu lorsqu’elle avait tout juste 18 ans. Le texte de Richard Kalinoski, mis en scène par Irina Brooks, fut pour elle une révélation : le théâtre permet de nommer les choses innommables, il permet d’exprimer les émotions complexes et de raconter les histoires oubliées avec trois fois rien. Plus de dix ans plus tard et une formation d’arts dramatiques en poche, le pari est lancé, et la compagnie voit le jour en 2010 autour de sa première création « Au revoir Pays » qui rafle le prix Jeune Talent de Paris la même année.
En 2013, la compagnie déménage avec sa directrice au Laos. Ses rencontres avec les marionnettistes de la compagnie laotienne Khao Niew ainsi qu’avec les jeunes danseurs de la compagnie Fanglao enrichissent encore sa pratique du théâtre en déclenchant une velléité de travailler non seulement avec des objets mais encore plus avec le corps sur scène et donc d’employer le langage de la danse sur le plateau. Depuis, Les Bêtes sur la lune collaborent régulièrement avec ces 2 compagnies.
Thiane, qui écrit et met en scène les créations de la compagnie, souhaite proposer un théâtre hétéroclite, tout public et populaire, autour de thématiques actuelles et sensibles. La compagnie s'axe sur un travail corporel de l'acteur, mêlant souvent plusieurs disciplines (théâtre, musique, marionnettes, danse, chant) tout en jonglant avec plusieurs registre théâtraux : le théâtre jeune public, le théâtre de rue, le théâtre burlesque et clownesque, la marionnette, le conte,...
La question de la transmission est depuis le début au cœur de son travail et dicte toujours l’assemblage de son équipe. Estimant que la formation continue est un élément essentiel de la construction théâtrale, la compagnie rassemble sur ses projets des équipes hétérogènes avec des artistes venus de tout horizons. S’obstinant à inviter « l’Autre » à la rencontre théâtrale, pour découvrir son art et sa pensée, et démontrer la richesse culturelle, elle invite toujours des artistes internationaux à se saisir de ses mots. Certaines pièces ont été montées avec des comédiens et danseurs venant de 4 continents différents et chacun parlant leur langue maternelle dans la pièce. Avec ce mode de fonctionnement, les artistes participent donc d’une action collective éducative, culturelle et d’influence, les uns envers les autres. Ce n’est pas un théâtre d’ambition, mais bien un théâtre de partage.